Le sable et la neige [ Adiba et Rûni ]

Messages : 7 Date d'inscription : 03/12/2019

Elle avait marché jusqu'où ses pas avaient accepté de la conduire.
Depuis longtemps, son cheval avait été vendu pour lui fournir vivres et matériel.

Elle était partie depuis longtemps.
Portée par sa foi ! Il lui en fallait peu.
Mais guère sa foi envers les dieux.
C'est en elle même qu'elle l'avait placé.

Sa connaissance des étoiles plus que sa carte abîmée l'avait guidée en ces lieux si étrangers.

Extatique, elle avait découvert des ciels inconnus.
La fatigue ne lui parlait plus, car depuis quelques kilomètres, elle sentait sous ses pieds un sol bien différent du sable ou de la terre battue qu'elle avait toujours connu. L'herbe des régions centrales l'avait déjà impressionnée de sa verdure et de sa douceur, loin de celle sèche qu'elle connaissait, mais c'était bien ce sol crissant et froid, pur de tout pas, et d'une blancheur qui lui faisait plisser les yeux tant le soleil y était réfléchi, qui lui donnait l'impression de vivre un rêve d'enfant. Ceux qu'elles faisait quand ses parents, le soir, lui contaient des histories merveilleuses de leurs voyages.

L'air aussi, fraîchi et piquant, la rendait pourtant plus vivante que jamais, tant elle se sentait revigorée par sa légèreté et sa pureté : lavé de toute poussière volante ou autre lourdeur, elle se sentait capable de gravir la plus haute des montagnes de cette chaîne avec cette puissance dans sa poitrine.

Néanmoins, elle commençait à sentir les contre coups de sa folie exploratrice. Elle avait bon nombre de Florés en poche -cadeau d'au revoir de ses compagnes prêtresses ! Et elle avait vendu bon nombre d'objets qu'elle détenait...- mais n'avait pas encore investit dans des vêtements plus chauds que ceux qu'elle portait habituellement, et un manteau simple acheté sur un marché de chez elle. Ses chaussures, seule exception, étaient des bottes fourrées. La tenue était assez chaotique, en soi, mais entachait à peine sa joie de vivre et sa beauté.

Mais ce n'était pas ce qui lui ferait passer la nuit. En vérité c'était déjà en soi un miracle qu'elle ait pu arriver jusqu'ici. Elle avait passé deux semaines par elle même, sans expérience réelle en dehors de sa maison religieuse. Sans doute une certaine protection divine pour ses loyaux services... Néanmoins ! Il fallait une auberge ! Et pour cela, une ville.

Adiba avait entendu sa mère parler de cette ville entre les montagnes, Hellisraun. Et c'est là qu'elle s'était rendu, transie par le froid, mais émerveillée de ce qu'elle voyait. Cette ville était celle des voyageurs, la plateforme de commerce, la porte ouverte vers un monde fermé qui n'avait pas besoin d'elle. Mais elle, elle avait besoin de le découvrir. Si demain son mensonge était découvert ou si les dieux devaient la punir, elle voulait avoir vue une Aurore Boréale.

C'était son vœux. Découvrir chaque merveille qui l'avait bercé. La neige tout d'abord, les grottes glacées... Et le ciel paré de ses plus beaux atours.
Elle avait déjà vu les étoiles sublimes, mais attendait encore ce cadeau de la nuit.

Elle attendrait.
Pour le moment : sa seule mission était de trouver où dormir et où acheter une tenue convenable, car elle sentait qu'on la regardait de manière bien étrange. Pourtant, elle, elle souriait à tout le monde, bien trop heureuse d'être ici.

A vrai dire, elle ressemblait à ces riches Arwenistes qui venaient parfois visiter les autres régions pour confirmer leur supériorité et s'attendrir de chaque chose qu'ils pouvaient voir.

Messages : 16 Date d'inscription : 07/12/2019

Le sable et la neigeft. Adiba Riheb

Hellishraun. Dans ses rues animées se pressaient autant de nordiens que d'étrangers. Les marchandises en tout genre emplissaient les étals et il était assez difficile de circuler librement au sein du marché. Avec un soupir de satisfaction, Rúni parvint à s'extraire de la foule et à prendre la direction, plus calme, des isbas et des auberges. D'un geste machinal, il vérifia que sa cache couvrait toujours sa chevelure écarlate, alors que son regard sautait nerveusement d'un passant à un autre. Il s'humecta les lèvres. Jusqu'ici, il n'avait croisé nulle personne qu'il connaissait, et c'était une sacrée chance. Enfin, oui et non. Il était déjà revenu en ville depuis sa fuite, il y a maintenant vingt-deux ans, et même si dans un coin de son esprit vivait encore le gamin effrayé qu'il était à l'époque, il avait suffisamment changé physiquement pour que la simple populace ne fasse pas le lien. Il y a deux ans, lors de son troisième retour, il avait osé faire un petit crochet. Rien qu'un tout minuscule petit détour sur le chemin de l'auberge. Bien évidemment, les débris calcinés de la maison de son oncle et sa tante avaient été déblayés depuis belles lurettes, et une autre habitation avait pris sa place. Il se souvint avoir versé une larme, et cela avait suffit pour qu'une voisine lui lance un regard curieux.

Depuis lors, il avait toujours pris soin de dissimuler ses cheveux et de ne plus remettre les pieds dans la rue de son enfance. Il ne savait pas si ses cousins vivaient toujours dans le coin, il avait trop peur de poser des questions et d'éveiller les soupçons. Et plus que tout, il avait peur de les confronter.

Un voile se leva devant ses yeux et, alors qu'il sentait son cœur s'emballer de plus en plus, il commença à étouffer. Sa respiration se fit plus saccadée. Ses mains devinrent brusquement moites. Ses jambes flageolantes.

Il savait ce qui se passait.

S'appuyant d'une main sur le premier mur venu, il se força à marcher jusqu'à une petite ruelle. Là, s'adossant, il leva la tête vers le ciel et entama quelques exercices de respiration. Dans ses souffles se mêlaient des prières adressées à Naldr. La déesse le punissait sans doute de tous les malheurs qu'il avait causé et, au paroxysme de sa crise d'angoisse, il crut qu'il allait même choir tant son corps tremblait et sa poitrine semblait s'affaisser autour de son palpitant.

De l'eau.

Prenant sa gourde, il avala les quelques gorgées qui lui restait de son périple et, doucement, il reprit plus ou moins le contrôle de son corps. Il regarda ses mains et constata avec un faible sourire que - pour une fois - il n'y avait pas de flammes involontaires.

Il prit encore quelques minutes pour se remettre les idées en place avant de reprendre son chemin en direction de l'auberge la plus proche. Le Tantsisklevponi était à deux rues de là, et il s'y dirigea donc d'un pas pressé. Se fondant sagement dans le décor, il entra et, après avoir compté ses économies, réserva une chambre ainsi qu'un repas. D'un ton dédaigneux, le patron lui fit savoir que tout ce qui lui restait était la grande chambre, et que bon, pour rentabiliser, il allait sans doute devoir lui coller un colocataire pour la nuit. C'était soit ça, soit il n'avait qu'à allonger davantage de pièces pour payer sa tranquillité... Malheureusement, c'était un luxe que le rouquin ne pouvait se permettre. Après avoir été rassuré sur le fait qu'il y avait bien deux lits séparés, il prit place à une petite table, non loin de l'âtre, avec son écuelle, une cervoise et un petit verre de vin de fruit, qu'il s'offrait afin de se retaper un peu. Il sortit un livre et se mit à dévorer lignes comme viande grillée.

Messages : 7 Date d'inscription : 03/12/2019

Après quelques deux bonnes heures à tourner en rond, admirant les façades des maisons, les tenues des habitants, les étales de marché, les décorations et les intérieurs que l'on pouvait voir à l'intérieur des maisons -sans gêne, Adiba regardait par les fenêtres les pièces de vie des Boréins-. Les isbas avaient l'air si accueillantes et confortables ! Des feux brûlaient le plus souvent dans les âtres... Mais d’expérience, la jeune femme savait que peu d'Acedians acceptaient d’héberger ainsi les voyageurs en quête de gîte.

Et si ils le faisaient, le dédommagement qu'elle donnait valait parfois bien plus qu'une nuit à l'auberge du coin... Certains de ses "hôtes" lui avaient même demandé de participer aux tâches ménagères ! Elle ! Si elle avait quitté la maison religieuse, ce n'était pas pour remettre ses douces miminnes au travail de sitôt.

Mais par un délicieux hasard, la jeune oracle aux pieds un peu plus lourds qu'auparavant découvrit un endroit où passer la nuit : c'était marqué en plein dessus, même elle ne pouvait pas louper l'information. "Tantsisklevponi, auberge". C'était absolument imprononçable et parfait !
Ouvrant sa sacoche pour jeter un regard au précieux objet qui en occupait presque tout l'espace, Adiba murmura :

- Est ce que cet endroit est bien, pour moi ?

Le masque d'os ne répondit pas par la gueule, mais le langage était clair : la teinte rubis de son front ne lui communiquait pas simplement un endroit neutre et sans danger, auquel cas la pierre serait restée cristalline, mais une bonne opportunité. Ce pressage, elle l’interpréta comme financier. Donc, une auberge sans risque, et dans ses frais. Quand à demain... Demain serait une nouvelle aventure !

La femme d'Aton-Ra poussa la porte de l'établissement avec vigueur, presque poussée par le vent. Un autre bon présage, ou simplement le signe d'une tempête se levant et nécessitant d'autant plus le besoin de rentrer au chaud. Toute souriante, la démarche dansante, la femme exotique s'approche du comptoir où un aubergiste de mauvaise humeur lui lança à peine un regard, ce qui ébranla un peu la confiance de la jeune femme. Mais elle n'en démordit pas pour autant :

- Bonsoir ! Je voudrais une chambre ! S'il vous plait.

Elle avait parlé, à son habitude, un peu trop fort. Avec un regard épuisé, l'homme lui donna les infirmations qu'elle voulait : il restait une chambre peu chère, et le moyen d'avoir un repas chaud -elle n'en avait même pas l'espoir !-, mais à la condition d'accepter un colocataire. Adiba haussa les épaules et rit.

- D'accord ! Mais seulement si il est beau et qu'il ne ronfle pas trop !

Silence de mort. La blague à plat, Adiba toussota pour masquer sa gêne et paya son dû sans rien ajouter. Elle aura essayé de détendre l'atmosphère, pas très bavards, pour l'instant, les Boréiens. D'un geste de menton, l'aubergiste lui désigna un homme attablé. Son colocataire ? Il avait l'air de convenir aux critères, enfin de ce qu'elle pouvait en voir, penché sur un livre, les cheveux si roux à la lumière des flammes qu'elle se doutait que si elle ne l'avait pas remarqué avant, c'était bien qu'elle l'avait confondu avec le feu lui même. Bon, il avait l'air occupé, et elle savait que la grande majorité des gens ne voulaient pas une présence inconnue à leur table quand ils étaient occupés.
Mais Adiba était-elle le genre de personne à s'en soucier ?

Non.

- Bonsoir bonsoir, moi c'est Adiba, je ne dérange pas ?

Sans attendre de réponse, elle prit la chaise la plus proche et s'assied, surveillant du coin de l’œil si un repas à sa destination semblait arriver, mais cela semblait trop tôt.

- Je pense qu'on va être colocataires ! Je te rassure, je ne ronfle pas. Et je me ferais discrète.

Autant que possible.

Messages : 16 Date d'inscription : 07/12/2019

Le sable et la neigeft. Adiba Riheb

« Cultivées pour la douceur de leurs parfums, les jacinthes bleues le sont aujourd’hui également pour les nombreuses utilisations qu’elles permettent à l’intérieur comme à l’extérieur de la maison. »

L'homme aux cheveux de feu poussa un léger soupir et continua sa lecture. Ce n'était pas la plante qu'il cherchait, ou tout du moins, cela manquait d'éléments exploitables. Il avait eu ce livre par un marchand qui venait du Palais des Sciences, un homme-rat assez étrange qui avait aussi essayé de lui refourguer une potion par la même occasion. Le liquide avait une consistance bizarre, mais bien moins que sa couleur qui hurlait "DANGER DANGER"... Autant dire que Rúni n'y avait certainement pas touché et il était vite reparti, son livre payé sous le bras. Et tout ça pour que le bouquin ne le renseigne en rien sur les plantes curatives.

La porte s'ouvrit, laissant le souffle du vent pénétrer l'auberge en sifflant alors qu'une jeune femme se glissait par l'ouverture. Les personnes présentes, tous des nordiens, eurent une mine étonnée en voyant une étrangère se retrouver au Tantsisklevponi. En général, ils préféraient les auberges plus proches du marché et ils ne s'aventuraient quasiment jamais du côté des isbas. Il y avait bien deux-trois marchands du Sud qui étaient des habitués ici, mais ceux de l'Ouest, on en voyait jamais. Et là, plus étonnant que tout, c'était une femme. Autour de lui, le rouquin entendit se chuchoter quelques paroles grivoises et un air contrit s'afficha sur son visage. Il n'aimait pas ce genre d'attitude, mais malheureusement, dans les Terres Boréales, c'était chose courante que de mal considérer une femme étrangère. Oh, pas celles de chez nous, la montagne les rendait souvent bien plus intrépides et courageuses que les hommes, ce qui, en général, créait un fossé immense entre elles et les femmes des autres royaumes.

Se replongeant dans sa lecture, Rúni prit une cuillère de son assiette sans quitter ses lignes des yeux. Il allait bien finir par trouver quelque chose d'intéressant quand même... Mais son attention fut aussitôt détournée par l'arrivée brusque de l'inconnue à sa table. Il releva les yeux, arrondis par la surprise, et il resta là, à la regarder s'installer, bouche légèrement entrouverte. Qu'est-ce que le quoi ? Pourquoi elle venait s'asseoir ici ? Il y avait encore plein de tables disponibles et- Oh. Colocataires ? Il déglutit et cligna des paupières avant de poser son livre et sa cuillère.

« Euh... Je... Enchanté. Euuuuh... Je m'appelle R-.... Brann. » se reprit-il.

Son esprit s'embrouillait et il n'avait clairement pas l'habitude qu'on vienne lui parler ainsi, du but en blanc. Il resta là, à regarder successivement la table et son interlocutrice, visiblement mal à l'aise et pas très bavard. Il nota cependant la grande beauté de la dénommée Adiba, et il se demanda bien pourquoi elle n'était pas aller trouver une chambre dans un quartier plus sympathique.

Messages : 7 Date d'inscription : 03/12/2019

Le sable et la neige

Feat Rûni Brann

- R'brann ? C'est un joli prénom !

Et avec ça, quel charmant accent !
Bon, ce n'était pas le plus simple à prononcer, mais les sonorités avec l'Ouest n'étaient pas si différentes de celles du Nord...

Mais à en voir les balbutiements de son interlocuteur, le fait qu'il soit seul et le livre qu'il tenait entre les mains, l'homme ne devait pas être un fameux bavard. Et sans doute elle le dérangeait. Adiba affichait un air contrit et désolé de le rendre aussi démuni. Elle espérait ne pas en avoir trop fait, elle n'était pas habituée à sortir et à se présenter, chez elle, tout le monde la connaissait ! Mais cette mauvaise pensée disparut bien vite. Si elle s'excusait et partait, la situation aurait été gênante pour rien. Il fallait assumer ! Et donc, ne rien changer.

Devrait elle ajouter R'brann à la longue liste de ceux qu'elle ennuyait ? Tant pis, elle faisait de son mieux pour briser la glace avec son colocataire. Quelle étrange coutume tout de même, enfin, elle ferait l'effort. En terre inconnue, il fallait faire comme l'habitant ! C'était une partie de l'aventure. Et puis, que pouvait elle demander de plus ? Elle avait une chambre peu chère, ce qui était une situation très bonne. Et avec un effort, elle allait se faire un nouvel ami ! De plus, elle ne pouvait se dresser contre l'avis de son trésor. Si l'endroit était bon pour elle, il le serait !

Et ce qui était bon, sur l'instant, était l'odeur qui arrivait de derrière elle. Un cuisinier lui apporta un petit plat de bois, bien différent de ceux en terre cuite de chez elle, contenant des morceaux de viande grillée, une purée de légumes inconnus, et du pain noir pour tasser le tout.

Manifestant sa joie par un large sourire et un "merci !" poli, la femme piocha avidement dans son assiette.

- Bon appétit ! Adressa-t-elle au rouquin.

Elle mourrait littéralement de faim, après toute cette marche, et si peu de réserves naturelles contre le froid ! Dans un environnement plus chaud et favorable, elle prenait conscience d'à quel point ses pieds étaient glacés, ainsi que ses mains. Son nez, de plus, avait pris une jolie couleur rouge, ainsi que le bout de ses oreilles. Le rude climat du Nord !

Mangeant comme une vorace, mais une vorace qui essayait d'avoir l'air distingué -ce qui n'était vraiment pas évident-, Adiba laissait un peu de répit à l'homme roux. D'ailleurs, elle avait pris une grande décision ! Elle allait essayer de ne pas affoler ce pauvre hère et de ne pas l’assommer de paroles. Enfin, autant qu'elle le pourrait.

Ce qui dura le temps de son repas pris en un éclair. Elle avait néanmoins essayé de prendre un peu de temps pour profiter du gout des aliments non identifiés. Durant ce temps, elle avait observé avec délectation et curiosité l'endroit, les gens, les rares et nordiques décorations accrochées aux murs...

- Ah ! C'était bien bon... Mais tout compte fait, ça manque un peu de boisson !

Halloween

Messages : 16 Date d'inscription : 07/12/2019

Le sable et la neigeft. Adiba Riheb

Quelle étrange personne... Rúni l'observa timidement, notant la vivacité de ses gestes et le rayonnement de son visage. Elle semblait faire partie de ces gens naturellement enjoués qui ont toujours l'air de prendre la vie du bon côté. Ah ! Parfois il ne pouvait que les envier. Mais pas aujourd'hui. En cet instant, il était déjà suffisamment tiraillé entre sa curiosité et son désir expiatoire de solitude pour qu'il n'y ait pas la moindre once de place pour éprouver un sentiment de plus. Il le voyait bien dans son regard qu'elle se freinait et dans son regard scintillaient toutes les questions auxquelles son esprit s'efforçait de faire barrage. Enfin, c'était ce qu'il pensait y lire, mais il faisait peut-être erreur. En tout cas, la jeune femme semblait avoir un bon appétit. Elle nettoya son écuelle bien avant lui, manquant cruellement de manières pour quelqu'un ne venant pas des Terres Boréales. Pour un habitant du coin, c'était on ne peut plus normal de se baffrer ainsi après une longue journée de marche. Cette vision arracha un petit sourire amusé à l'homme, qui continuait son repas de façon plus sobre.

Ses yeux bleus ne purent s'empêcher de jeter de petits coups d’œil à sa colocataire d'un soir : cette tenue était un véritable désastre ! Le froid pouvait s'insinuer sous n'importe quelle couche de vêtements tant ils étaient peu épais, le manteau manquait de doublure, elle n'avait pas de bons gants ni d'écharpe... Le seul point potable étaient ses bottes, qui de ce fait détonnaient avec tout le reste. On dirait presque qu'elle s'était rendue jusqu'ici sans rien savoir du coin et sans véritablement se préparer comme il se doit. Alors certes, Hellishraun demeurait l'une des villes les plus au sud des Terres Boréales, mais il y faisait déjà suffisamment frisquet pour commencer à s'habiller comme il se doit. Mais... peut-être n'avait elle pas eu le choix ? Peut-être faisait-elle une fugue ? C'était une adulte, qu'est-ce qui pouvait la retenir chez elle ? Plusieurs réponses possibles se matérialisèrent dans son esprit mais il le repoussa bien vite. Il n'était pas juge du passé de cette jeune femme, car seuls les dieux sont capable de sonder les âmes mortelles.

Néanmoins, il pouvait tout de même faire quelque chose pour la fille de l'Ouest. Il se pencha un instant pour fouiller dans sa sacoche, cherchant un petit pot bien précis. Une fois qu'il eut mis la main dessus, il le posa sur la table et le poussa gentiment vers la demoiselle.

« Une boisson sans doute, mais vous aurez surtout besoin de ça. C'est une crème contre les engelures. Et... C'est juste Brann au fait. »

En disant cela, il avait détourné le regard, à la fois gêné par le fait de reprendre quelqu'un et parce qu'il savait qu'il lui mentait à moitié. Mais rien à faire, l'embarras était trop fort. Il se leva alors, lâchant qu'il allait leur prendre à boire, et se dirigea maladroitement jusqu'au bar. Là, l'aubergiste le dévisagea un instant avant de jeter un oeil à l'étrangère par dessus l'épaule du rouquin. A son expression, il était facile de deviner qu'il les méprisait autant l'un que l'autre, elle pour son humour maladroit et ses origines, lui pour être un maigrichon et une honte pour sa patrie. Mais cela ne l'empêcha pas de leur remplir deux bocks de cervoise que Rúni ramena à table. Ce petit interlude semblait l'avoir détendu, ou tout du moins, il avait un sourire doux qui flottait sur son visage.

Mais dans sa tête, il ne pouvait que s'insulter pour être aussi bête, niais et stupide.

Messages : 7 Date d'inscription : 03/12/2019

Le sable et la neige

Feat Rûni Brann

- Et bien, juste-Brann-en-fait, merci beaucoup !

Avec une mimique entre le sourire et l'air gêné de ces enfants un peu naïfs et aisément vexés qui sont pourtant bien contents quand quelqu'un de plus compétent qu'eux rattrape gentiment leur erreurs, Adiba accepta le pot qu'on lui tendait. Elle était décidément très reconnaissante envers cet étranger qui se montrait bien plus hospitalier que tout eux qu'elle avait pu rencontrer avant ! Elle n'avait pas manqué les remarques déplacées, condescendantes, moqueuses ou ignorantes qu'on murmurait dans son dos depuis son départ. Mais elle veillait à ne pas se laisser atteindre. Elle était une messagère des dieux ! Une prophétesse respectée par chez elle, et sa fierté était trop grande pour quelques rustres réussissent à la piétiner.

Néanmoins, les simples actes de gentillesse purs, comme celui ci, la réchauffaient comme n'importe qui d'autre. Un peu de chaleurs humaine, au milieu de toute cette glace ! Son regard était reconnaissant, et elle rangea pour plus tard le petit pot dans un repli de son sarouel. Son sac était rempli à craquer de matériel divers, et son très précieux masque en prenait une majeure partie... Mais ce n'était pas grave, sa tenue avait le potentiel d'une véritable caverne d'Ali Baba, même Adiba ignorait combien de poches et de capacité elle possédait. Elle se promit d'essayer son baume une fois dans la chambre, ici elle avait peur de faire une maladresse ou de déposer la précieuse crème sur tout ce qu'elle toucherait avec ses mains.

Dans sa culture, les baume étaient souvent des cadeaux estimés, surtout ceux au lait d'ânesse et aux nectars divers, qu'on offrait aux femmes importantes et coquettes, car il s'agissait souvent de soins corporels ou de parfums plus esthétiques que réellement pratiques. Mais dans le Nord, le sens de l’objet devait être tout autre. Le besoin était beaucoup plus concret, et cet objet sans doute plus courant.

Perdue dans ses questions d'ordre anthropologique, Adiba prit bien du temps avant d'être foudroyée par une idée soudaine : Est ce que tout les Nordiques savaient eux mêmes faire leur baume ? Est ce que Brann était un... Un Baumiste ? Un Faiseur-de-médicaments-et-de-soins ? Mince, quel était le terme ? Pas Apothicaire... Oh voilà ! Un herboriste !

Après tout, il avait bien l'air de lire quelque chose sur les plantes, et il n'avait -ce qui n'était pas un défaut pour elle, loin de là- pas la carrure d'un guerrier. Elle allait lui poser la question, toute intéressée, quand il se leva. Chercher des boissons ? Oh mais c'était de l'humour ! Elle ne comptait pas réellement lui faire dépenser son argent. Mais trop tard, il était déjà partit. Mince. Elle s'en voulait un peu, mais se dit qu'elle se rattraperait en lui faisant une petite lecture de son avenir plus tard si il le désirait !

Quand il revint et déposa devant elle un boc de cervoise -ça, elle connaissait !- la femme aux cheveux blancs lui adressa un "C'est très généreux à vous, décidément. Vous êtes assez exceptionnel je dois dire, monsieur Brann." qu'elle espérait suffisant. Elle tendit son boc en avant pour trinquer avec lui, puisqu'elle le considérait déjà comme au moins un ami en devenir. Elle comptait déguster ce verre avec plus de lenteur que son dîner, car elle se connaissait mieux que quiconque et craignait que l'alcool Boréins, sans doute plus fort ici que celui de Denderrah, ne lui monte vite à la tête. Elle voulait éviter de se ridiculiser plus, ou de perdre ses moyens. Elle ne toucha donc pas de suite à sa boisson.

- Au fait je voulais te demander, le baume, c'est toi qui l'a fait ? Tu es médecin, herboriste ?Je te vois assez mal être un chasseur d'ours ou un guerrier, mais tant mieux, parce que ce n'est pas très intéressant !

Et en quelques mots, voilà que la moitié de la salle venait sans aucun doute de la détester. Mais hé, tant pis, les dieux la protégeaient, elle ne craignait rien. Enfin si, elle craignait de pouvoir se tromper, et que son interlocuteur se vexe, ce qui serait la pire, mais vraiment la pire, des choses. Ou qu'il la trouve idiote, au choix.
Halloween

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